skoeldpadda a écrit :uberwenig a écrit :La forme shmup dicte le jeu, et le game system, si complexe et purement roguelike soit-il, est construit sur le socle du shmup, ce n'est plus le shmup qui vient habiller le rogue-like.
Sauf que... Si.
Je déteste sortir l'argument d'autorité, parce que je trouve ça horriblement vain et que ça tue généralement tout débat, mais dans ta (très aguicheuse) théorie de la poésie globale du jeu vidéo, il y a une réalité pratique que tu oublies totalement.
En l'occurrence,
je sais que j'ai raison et que ça se passe comme je le dis, parce que
j'ai été demandé à Vlambeer, à Arcen, à Over the Top Games et à un ou deux autres dont le nom m'échappe quand j'étais encore le boss d'RPGFrance. Tous, sans aucune exception, m'ont dit "roguelike" (ils sont même plutôt du genre à utiliser le terme "roguelite" parce qu'ils sont parfaitement au fait de la vague de rejet hardcore que crée ce genre de produit).
Que tu piques l'idée à Isaac ou pas, la base, c'est le roguelike, et c'est mécaniquement nécessaire, parce que le roguelike est tellement compliqué à coder et équilibrer que tu ne peux tout simplement pas baser ton jeu sur un shoot "et foutre du roguelike par dessus" (sinon, ça donne Steredenn, et ça
marche pas). Ca mettrait ton shmup par terre en déséquilibrant sa mécanique intrinsèque (level-design, patterns, power-up) en l'aléatoirisant. Tu
dois prendre le problème dans l'autre sens, et
tous les développeurs du genre auquel j'ai pu parler m'ont confirmé ça : ils bossent le roguelike, l'équilibrage, la progression, "le chiffre", et ensuite (
ensuite!) seulement, ils bossent l'intégration de ces mécaniques sur le rythme d'un gameplay de shoot. Là ça marche, parce que l'aléatoire ne vient pas empiéter sur un gameplay particulier, c'est le gameplay qui est construit en fonction de l'aléatoire.
J'entends bien ce que tu dis (enfin, je le lis, pour le coup, mais ça fait écho aussi à quelques échanges verbaux qu'on a pu avoir), et je vois en quoi tu as raison...
Sauf que l'argument chronologique de la construction n'a aucune valeur, en fait, pas plus que la quantité de travail qu'ont pris respectivement les deux aspects.
(Et à dire vrai, pas plus que la parole des créateurs eux-mêmes, en fait, mais c'est un autre débat)
Attention, j'insiste juste sur le fait que mon propos n'est pas de savoir si c'est "un roguelike saupoudré de shmup" ou "un shmup saupoudré de roguelike" (=steredenn, pour le meilleur comme pour le pire, shmup nerveux intéressant et plaisant, mais aspect roguelike mal géré qui nuit finalement à l'équilibre et la dynamique du jeu).
Tout ce que je dis, c'est que Nuclear Throne est à la fois Roguelike et shmup, et que le shmup n'est pas qu'une incidence de circonstance.
Pour le fait que les créateurs des jeux mettent en avant la dimension roguelike dans leur discours, ça s'explique de plein de façon :
-Vlambeer (pour rester sur un exemple) et en particulier Nijman, a bien roulé sa bosse et s'est essayé à plusieurs reprise au shmup en solo et une fois au moins avec Vlambeer (et l'amour de Vlamsbeer pour l'arcade et l'action bien branlée transparait généralement sans problème, même sur des échecs partiels comme Luftrausers).
Donc forcément, à l'ère de l'effet de mode des Roguelike/roguelite, on ne va pas présenter son jeu comme "un énième arena shmup OSEF,
MAIS avec une composante roguelike", mais plutôt bien mettre l'accent sur la roguelikerie, surtout que, au vu de son parcours personnel, c'est cet élément qui représente un défi, de par l'exigence de la communauté amatrice de Roguelike et sa faible expérience dans le domaine en tant que créateur.
Et comme la dimension roguelike est à l'évidence, autrement plus difficile à créer, plus longue à équilibrer, et très certainement plus excitante à mettre en place que la partie shmup, à terme, tant dans le coeur du créateur qu'en terme de proportion de travail, c'est ce qui prime,
et qui va primer aussi dans la com'.
Maintenant, je t'avoue que ça m'étonnerait que pour
Enter The Gungeon, l'idée d'en faire un shmup soit venue en dernière instance. Ca m'étonnerait aussi pour
Nuclear Thrones.
Mais que ça vienne en fin de parcours
au niveau de la chronologie de développement, ça me semble logique, vu que pour pouvoir équilibrer et créer une dynamique de terrain de jeu, connaître déjà les métadonnées me semble primordial dans ce type de jeux, ça ne se twitche pas en fin de prog, à l'arrache. (mais j'en sais rien, je n'ai jamais ni programmé ni créé de jeu)
Et pour le cas de Vlambeer, leur expérience dans la programmation "arcade" est suffisante pour qu'ils se sentent sûrs d'eux, et donc commencent par affronter "le gros morceau".
La forme est une "formalité"
pas en terme d'importance, mais simplement en terme de
défi de programmation. C'est du moins comme ça que j'interprète les choses que j'ai pu voir et lire.
Mais ce n'est pas parce que la dimension shmup a pris moins de temps au développeur, ou qu'elle est laissée à la fin du développement (de par son caractère encore une fois entier, simple et pur plus qu'autre chose à mon avis) que ça change quoi que ce soit : le jeu, une fois en main, est un twin stick STG en arène générées de façon procédurale, avec un game système rogue like profond et précis, mais qui ne fait pas disparaître le shmup, ni ne prend le dessus sur lui, puisqu'au final, c'est dans ces arènes générées procéduralement que les combinaisons pourront causer.
Le shmup a le dernier mot, de fait.
Il ne balaie pas le Rogue Like, simplement les deux aspects (shmup et Rogue like) sont deux facettes indissociables, pour l'exemple en question tout du moins et probablement quelques autres. L'un a l'aval formel, l'autre systémique. L'un fait autorité manette en main, l'autre en tant qu'armature secrète.
Si tu enlèves, comme tu le dis, les couches de shmup, il reste le game system mis à nu, mais dénué de tout plaisir de jeu, à part pour les fans hardcore de rogue-lite.
Et je trouve que justement, pour Nuclear Thrones, si facile et rapide qu'ait pu être la programmation de la dimension gameplay, c'est malgré tout le medium par lequel l'armature s'exprime.
Pour faire une analogie qui n'est pas dénuée de sens, si le roguelike est la composition, le twin stick shooter est la voix, le timbre, l'organe.
Et bien que chanter ne demande pas de temps et d'effort à quelqu'un pourvu d'un bel organe, le résultat est généralement le mariage de la qualité, de l'équilibre de la composition, de l'arrangement, et celui de la voix, de l'inflexion de l'interprétation.
Mais bref, ce n'est pas une métaphore ni un pavé de plus qui va te convaincre, et l'inverse est vrai (même si je prends plaisir à te lire, à plus forte raison quand tu n'es pas d'accord car ça m'oblige à questionner mes position, le remettre en question s'il y a lieu, les renforcer le cas échéant).
Je ne pense (toujours) pas que c'est une question de Vrai, simplement que c'est une question d'angle, d'approche et de nature.
Je le répète : je pense que le choix du shmup n'est pas anodin, qu'il n'est pas interchangeable, que les jeux seraient différent par essence s'ils ne choisissaient pas ce mode d'expression, à structure rogue-like identique en arrière plan, et peu importe la place que la dimension shmup ait eu dans le développement, ou dans les discours des créateurs.
Le résultat se jauge, encore et toujours, manette en main, dans un élan schizophrénique vierge où l'on fait table rase de nos bagages pour aller vers ce que le jeu offre pour découvrir se qu'il est.
Ou on peut le passer à la moulinette des références et des discours, c'est aussi pertinent.
Simplement dans un cas comme dans l'autre, les découvertes ne seront pas les mêmes.
(d'ailleurs, ma relative "virginité" a été un des facteurs de fascination face à Isaac, outre l'ambiance et tout ça, le fait de découvrir qu'un jeu pouvait offrir tout ça, que la permadeath n'était pas une sanction et une fin en soi, qu'un pendant "jeu de rôle" (c'est à dire tout simplement un metagame) était possible sans système d'XP et de survie nécessaire...etc)
EDIT : et après avoir repris en main la bête, je persiste et signe, et pour une raison finalement qui tombe sous le sens au point que j'avais omis de ne serait-ce que le mentionner : quand je dis "manette en main", c'est surtout que pour la plupart des jeux mentionnés ici, l'exploration (pris au sens large, tant des secrets que des maps) est roguelite, mais le challenge est d'abord et surtout (donc chronologiquement et en terme d'importance) twin stick shmup. On dompte le jeu par la pratique, par l'arcade, par l'assimilation d'un savoir-faire.
(je le mets en "EDIT", parce que loin de moi l'envie et l'idée de relancer un hors sujet, ou que ça soit pris comme une provoc quelconque, mais ça m'agaçait de ne pas avoir énoncé clairement les choses
)