La NES n'ayant pas encore eu les honneurs de cette rubrique, il est temps de réparer cette injustice.
Cas no.12 : Galactic Crusader, de Bunch Games (NES, 1990)
Il n'y a à priori aucun rapport entre un papillon, une sorcière, l'espace et Dieu. Et pourtant.
Ce qui est bien dans la vraie vie, c'est que tout y est cohérent. Les papillons voltigent dans les campagnes baignées de soleil tandis que les sorcières se terrent dans de lugubres châteaux, l'espace abrite des nuées d'étoiles et de multiples univers que l'on imagine habités par d'effrayants extra-terrestres, et Dieu, simple rumeur pour les uns, absolue réalité pour les autres, surveille tout ce beau monde. Bref, chaque chose a sa place - et c'est tant mieux.
Alors évidemment, lorsqu'un développeur de jeu vidéo totalement inconscient décide de remettre en cause l'ordre des choses, on ne peut que se montrer dubitatif.
Galactic Crusader, édité par le très obscur
Bunch Games, narre l'histoire d'un papillon bleu-violet (?) qui, après s'être pris un monumental coup de boule par une sorcière (??), se lance dans l'espace (???) pour y affronter des myriades de soucoupes volantes aux déplacements erratiques.
Soyons honnête, des jeux bizarres, on en a vu plein - et tous ne sont pas à jeter.
Galactic Crusader, toutefois, ne mérite aucun honneur - il fait absolument n'importe quoi. Son univers n'a aucun sens, c'est un fait. Son gameplay, qui aurait pu rattraper cette erreur de goût, ne fait hélas que l'amplifier. Se déroulant selon un scrolling vertical,
Galactic Crusader (aussi connu sous le nom
Papillon ou
Chou Hen) se contente d'enchaîner vagues après vagues d'ennemis insignifiants au sein de ballets trop véloces et désordonnés pour que le maigre tir du joueur parvienne à faire le ménage. De temps à autres, quelques power-ups viennent aider à la tâche (tir frontal plus puissant, tir triple, invulnérabilité, bouclier de protection façon
R-Type…), mais l'impression reste celle d'un titre mou et paradoxalement trop rapide, dans lequel l'ennui et l'agacement se mêlent instantanément pour donner naissance à un cocktail que l'on hésiterait à servir à son pire ennemi.
Ce qu'il y a aussi de bien dans la vie, c'est sa réalisation - exceptionnelle en tous points. Les graphismes en haute résolution explosent de mille couleurs ; les scrollings, systématiquement fluides et multi-directionnels, s'animent sur plusieurs plans ; et le son, à 360 degrés, ne souffre d'aucun défaut de compression. Parfois, lorsqu'on a trop bu, les couleurs perdent en cohérence et les contours se font moins précis, mais dans l'ensemble, la vie, c'est quand même super beau.
Galactic Crusader, même lorsqu'on n'est pas bourré, est super moche. La NES n'est pas un foudre de guerre, mais bien utilisée, elle est capable de petits prodiges -
Recca, dont l'ami Hydeux a consacré une large partie de son cervelet à la
dissection de ce monument du shoot them up, montre à quel point la machine en a dans le ventre. Les plus curieux pourront également tester l'étonnant
Gradius II, adaptation très libre du hit d'arcade, mais à la réalisation tout aussi phénoménale. A côté de ces deux mastodontes du shoot sur Famicom,
Galactic Crusader ne fait pas le poids : l'animation est certes fluide, mais c'est bien là le seul point positif que l'on retiendra. Graphiquement, le jeu est d'une pauvreté absolue : décor inexistant, indigence des sprites, couleurs laides et ternes… Le graphiste ayant officié sur ce programme n'en était clairement pas un. Pire que le graphisme : la musique. Bouclant au bout d'une trentaine de secondes seulement, entêtante comme aucune autre, elle a la mauvaise idée de se répéter jusqu'à la nausée, pour ne se renouveler qu'une fois le seuil du niveau 4 franchi.
Et la vie, pourtant si belle, devient un véritable cauchemar.
Verdict : Galactic Crusader, une daube ?
Oui. Non content d'être ennuyeux,
Galactic Crusader est horripilant. Il ne mérite aucune indulgence de notre part.
J'en entends certains me dire "Et Dieu alors ? Que vient-il faire dans cette galère ?" On se rappelera alors que
Bunch Games, alias
Color Dreams, est cet éditeur qui, un peu plus tard, fera ses choux gras grâce au développement de jeux à très forte tendance religieuse sous la bannière
Wisdom Tree. Le point commun de toutes ces productions ? Leur absolue médiocrité.
Comme quoi, même avec Dieu à ses côtés, on ne fait pas de miracles.
Niveau de daubitude : S