Vous savez déjà ce que je pense de Steredenn, donc vous avez probablement une vague idée du puissant a-priori avec lequel je partais vis-à-vis de celui-là... mais, Drifting Lands est pire.
Et Drifting Lands est pire essentiellement parce qu'il ne repose pas sur le principe roguelikesque de Steredenn. Dans Steredenn, la progression est aléatoire et déséquilibrée mais répond à une logique : les vagues adverses sont procédurales, on sait pas ce qu'on va ramasser sur la route ni sur quel type de boss on va se heurter à la fin, et on recommence à l'envi en ne jouant jamais deux fois la même chose.
Dans Drifting Lands, de roguelike il n'est aucunement question. Ici, chaque niveau est prédéfini, on y entre avec un loadout (vaisseau, armement, compétences actives) qu'on a défini à l'avance et qu'il est hors-de-question de changer en cours de stage, on y loote des trucs dont on ne connaîtra la nature qu'en fin de stage, et on avance sur une carte à nodules (que je vais comparer à celle de Chronicle Saviours pour que vous ayez une idée de la façon dont on y progresse, mais qui n'a rien à voir en pratique), refaisant ad nauseam chaque stage en faisant progresser son vaisseau un peu à chaque fois jusqu'à être assez fort pour pouvoir s'attaquer au suivant.
C'est, pour être tout à fait honnête, un modèle qui me rappelle beaucoup pas mal de shoots f2p mobiles et que je trouve justement fort agréable sur un f2p mobile... mais Drifting Lands est un jeu pécé à 15€, pas un f2p mobile.
Alors sûr, il est beau, il a la production value pour mériter son tarif, mais même de ce côté là, il y a beaucoup à redire : l'écran shake pour un rien (et j'ai pas trouvé d'option pour le désactiver), les masques de collisions sont assez compliqués à deviner (même celui de son vaisseau, dont la hitbox est pourtant affichée à l'écran!) et les effets graphiques cachent souvent les formations et patterns ennemis, quand ce n'est pas carrément un vaisseau qui passe au premier plan pour faire joli et boucher TOUT l'écran pendant une bonne seconde.
En fait, et c'est fondamentalement drôle mais également très très triste, on retrouve dans Drifting Lands tous les défauts de l'euroshmup et du rogueshooter en même temps : en partant sur une mécanique (celle du loot) plutôt que sur un gameplay (celui d'un shmup), le jeu en ressort absurdement mal équilibré, mou comme c'est pas possiblement permis (genre, pire que Sine Mora), avec un level-design chiant comme la pluie et un graphisme certes superbe mais qui sert au final plus de cache-misère pour un gameplay ultra-creux que de plus-value esthétique.
C'est de l'early access, aussi on peut avoir un semblant d'espoir d'avoir un jeu un peu moins pataud et besogneux d'ici une sortie définitive, mais, sachant que Drifting Lands est en développement depuis 2015 et qu'on a déjà eu une version démo qui faisait étal des même défauts, j'ai un sérieux doute.
Et vous savez ce qui est le plus triste ? Tout ceci est parfaitement assumé par les développeurs. Ils le disent clairement dans leur présentation :
Je n'ai lu la présentation qu'après avoir joué au jeu, et au delà de l'intention de départ, ce "un genre différent de shoot'em up" sonnait soudain comme un aveu d'impuissance, du type "on sait qu'on n'a pas fait un bon shmup, mais c'était pas le but, alors c'est pas grave, si?"C'est l'essence de Drifting Lands : avant tout un action-RPG[...], ensuite et seulement ensuite un genre différent de shoot'em'up
Et on va être clair : si. C'est grave. Si je me base sur le fait qu'on soit sur Shmup'em all, et donc qu'on est des shooteux, ce genre de produit hybride prouve à chaque nouvelle itération qu'on n'est juste pas clients. Question shmup, Drifting Lands ne vaut tout simplement pas un clou. Mais le pire, c'est que, hack'nslashiste et roguelikeur averti, je touche aussi ma bille sur le segment principal revendiqué par les développeurs, et même là. MEME LA! Rien. J'ai en vérité beaucoup de mal à voir où se trouve le hack'n slash/action-RPG dans le marasme étrange de gamedesign qu'on essaie d'imbriquer de force qu'est Drifting Lands.
Et c'est pas comme si je faisais exprès de lui tailler un costard, en plus, je suis ultra client de ce genre de jeu (pensez donc, un RPG et un shmup en même temps?), mais comme beaucoup de jeux sur le segment, Drifting Lands n'arrive pas à trouver son équilibre. Sa progression rôliste est étriquée et formuléïque et son action shmupesque est molle et terne.
Qui plus est, on ne manque pas de jeux qui marchent pour comparer non plus :
Vous voulez un jeu qui mélange shoot et hack'n slash ? Jouez à Neurovoider.
Neurovoider est un twin-stick procédural aux niveaux courts et intenses, avec un feeling assez ouf de chaque arme, des vagues ennemis facilement négociables (c'est un twin-stick, ça aide) et, surtout, un vrai loot "à suffixes" diabloesque au possible qui impacte directement le gameplay de votre petit robot.
Et histoire de finir la comparaison jusqu'au bout, c'est issu du même genre de développeur : Alkemi est un petit studio nantais, et Flying Oak Games est un duo messin. (A croire, sachant que Steredenn est un jeu breton, que ce genre d'idée bancale est l'apanage de la vidéoludie française...)